« Un grain de poésie suffit à parfumer tout un siècle » – José Marti.
Tempus
La blême berne bêle
Bardée de bruine, impassible
Comme le spleen, ce hisse au ciel.
Ô mélasse des saisons insensibles !
Mais cours, marche, ou fuis-moi toujours !
Je te suis dans ce huit infini
Puisque tu fais de ma vie,
Une nuit plus claire que le jour.
Et je crie aux poètes minables ;
« Ôtez les atèles de plomb, par la fable,
Des sabots du temps infatigable ! »
Est-ce le ciel qui te protège ?
Qu’importe le prestige de tes manèges
Si sur l’olympe, nymphe, tu sièges.
Créateur du Chaos, Chronos aux crocs d’or,
Croque le cadrant de ton compteur à gousset
Que je me gosse de ne plus ouïr crier ;
« Tempus rerum imperator ! »
J’érige à ta gloire pérenne un palladium,
Qui pour épigraphe, sur une ardoise d’iridium,
Cite des strophes stériles et des hymnes vains,
Des poèmes inféconds, en attendant demain.
Aujourd'hui
Les amantes solitaires des corsaires
Ne s’enquièrent plus des forces du typhon.
Les orages toussent des éclats d’ondes solaires,
Et les airs, à mon tympan, sifflent ton nom.
Les drakkars sont des faussaires de guerre,
Désarmés, comme des galères à l’abandon,
Qui – ô bel espoir du père des mers –
Consolent mes frères et modèrent l’horizon.
Les casaniers sans lumière de Platon,
Pour rendre plus brillant leur sombre univers,
(aux treize richesses d’un puits d’or sans fond)
Ont volé l’orbe à Saturne et la foudre à Jupiter.
Ô déité adorée, tu possèdes le miracle et le don,
Qui font se confondre le réel aux chimères,
Pour extraire de mon être le dicton :
Aujourd’hui, tout est calme, quiet et prospère.
M.C
MC à la bouche lustrée par le rire,
Aux lèvres submergées de vie,
A la peau de terre de sienne brûlée,
Aux lèvres d’un sol craquelé de trop sourire,
Aux lèvres de plumes et de pierres polies,
A la candeur masquée,
A la richesse des trophées,
Aux mille charmes et d’innocents miracles,
Aux mille façons de plaire,
Aux mille vétilles,
Au regard qui luit sous cent feux éteints,
Au regard qui ajoute les nuages à l’azur bénin,
Aux yeux colorés d’or et d’argent,
Aux yeux pleins de larmes rangées,
Aux larmes comme des soldats fatigués,
Au cœur garni de fardeaux,
Au cœur lourd,
Au cœur à l’armure d’asphalte.
MC aux mots du Gotama,
Aux mots de la tour de Babel,
S’envolant sous le zéphyr, dansant sur le breva,
Emportent une mélodie sous leurs ailes,
Et déposent une étrenne pour Eustache.
Luciole
Souffrez ma famille, mes frères et sœurs lampions,
D’accueillir sans délai l’agrément mutique de l’ennui,
Des plaintes incapables qui s’évaporent au plafond,
A chaque agonie du jour, à l’heure où germe la nuit.
Je suis lasse de ne rien faire, que de vous savoir,
Tel Tantale si proche et toujours empêché,
Par les chaînes, de ramener à sa mâchoire,
La pomme, de ses doigts par la faim étirés.
Suis-je d’une si terrifiante disgrâce à vos yeux ?
Connaissez, ma famille, mes frères et sœurs d’éclair,
La fouille éternelle des moyens d’accéder à vos lieux,
Ainsi qu’à l’endroit de ce papier, la prière,
De vous voir un jour tomber jusqu’à moi, des cieux,
Alors, comme une certaine pluie d’or et de lumière.
